L’association ASER (Action Sécurité Éthique Républicaine) lutte pour la promotion des droits de l’Homme dans le champ de la paix et de la sécurité. Spécialisée dans les questions de transferts d’armes, elle s’inquiète notamment des exportations de matériel de guerre de la France vers Israël et du risque que cela représente pour la population gazaouie. ASER a formé une demande de suspension des transferts d’armes auprès du juge administratif. Ce dernier s’est déclaré incompétent au motif que les licences d’exportation d’armes ne sont pas détachables des relations internationales de la France. Autrement dit, les licences d’exportation tombent dans le domaine des actes de gouvernement qui ont la particularité d’être dotés d’une immunité juridictionnelle : les juges ne peuvent pas y exercer un contrôle. Cependant, sous réserve de comment statueraient des juges internationaux et nationaux, les manquements manifestes au droit international par Israël interrogent, par voie de conséquence, sur la responsabilité de la France. En effet, avec l’attribution de licences d’exportation de matériels de guerre à destination d’Israël, se rend-t-elle coupable de telles violations ?
L’ASER se prépare à saisir le Conseil d’État afin d’obtenir la suspension des transferts d’armes. Cela leur offre également l’occasion de formuler une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui pourra être examinée par le Conseil constitutionnel.
Le travail clinique consiste donc en la rédaction d’un rapport QPC, réunissant des arguments afin d’interroger le mécanisme de délivrance des licences d’exportations par l’administration vis-à-vis de la Constitution qui doit garantir les droits et libertés.
Mais la théorie des actes de gouvernement est un obstacle de taille. Nous avons pour cela réfléchi à deux stratégies différentes. La première consiste à s’y attaquer frontalement. C’est-à-dire montrer l’absence de justifications solides de cette théorie, tant par ses fondements que par sa viabilité dans le système juridique européen et international. La seconde stratégie consiste en l’acceptation de cette théorie. Néanmoins nous avons souhaité démontrer que le législateur a offert un trop grand pouvoir discrétionnaire à l’administration en ce qui concerne la question des transferts d’armes. Ce faisant, le législateur n’a pas fait usage de la plénitude de sa compétence. Il aurait dû inclure des mesures pour garantir le respect des droits fondamentaux en incluant une autorité contrôlant de manière indépendante les délivrances de licences d’exportation.